Touchée
Ma coloc (encore une Annie, je les collectionne un peu) l'écoutait en boucle quand j'avais vingt ans. Je le trouvais légèrement ringard, cet américain nasillard à la guitare folklorique. Son nom même me semblait kitschissime. Mais j'aimais bien ma coloc alors j'écoutais avec elle, un peu envieuse de son enthousiasme. J'ai pris « American III: Solitary man » à la médiathèque mercredi, entre Jeanne Cheral et Nougaro. Je l'ai mis dans le petit lecteur de la salle de bain. Je me plonge dans la baignoire à moitié pleine d'eau plus tout à fait assez chaude, un verre de Hoegaarden bien plein à portée de main. Les lentilles ne vont pas tarder à déborder, j'ai environ quinze minutes devant moi. Il chante One. Il a pris une chaise à côté de la baignoire, je peux toucher sa guitare. Il est poignant, j'ai lu ça sur lui et c'est exactement le mot qu'il faut. Il me prend le coeur dans sa grande main et il serre un peu, juste assez pour que je me sente aussi proche de cet homme américain dont j'ignore tout que de mes enfants qui dansent la sarabande à l'étage au-dessus. Il s'appelle Johnny Cash.